16 mars 2023

Créer des cultures de travail inclusives à distance et en personne

Créer des cultures de travail inclusives à distance et en personne

*Rédigé en collaboration avec Hannah MacLean Reaburn

Cet article fait partie de la série « Créer des cultures de travail inclusives » par Latitude Management pour la Journée internationale des femmes 2023. Cette série d’articles traite des différentes façons dont les employeurs peuvent «embrasser l’équité » (#EmbraceEquity) dans leurs lieux de travail.

En tant que cabinet spécialisé dans la création d’environnements de travail positifs, Latitude Management est parfaitement conscient de la nécessité d’embrasser l’équité (#EmbraceEquity) et de créer des milieux de travail où les femmes peuvent s’épanouir. Les femmes et les personnes trans et non binaires sont visées par le harcèlement et laviolence au travail de manière disproportionnée par rapport aux hommes. En outre, lorsque d’autres facteurs identitaires s’ajoutent au genre, cela crée des situations de discrimination, de harcèlement et de violence en milieu de travail uniques et aggravées. Les femmes peuvent être confrontées à des défis supplémentaires dans un milieu de travail hybride ou à distance, ce qui en fait un point de réflexion important à l’occasion de la Journée internationale des femmes et au-delà.

La commodité et la flexibilité du travail à distance en font une option attrayante pour les employeurs comme pour les travailleurs. De nombreux employeurs ont décidé de maintenir un certain degré de travail à distance par le biais, par exemple, d’options hybrides. À mesure que les milieux de travail évoluent, il est essentiel d’être attentif aux défis et aux avantages que peuvent présenter le travail en présentiel et le travail à distance en lien avec la prévention et la gestion du harcèlement et de la violence au travail.

À distance ou en personne : L’un est-il préférable à l’autre?

Les employés et les employeurs sont susceptibles d’avoir une préférence entre le travail en présentiel et le travail à distance pour un certain nombre de raisons. Or, lorsqu’il s’agit de prévenir et de répondre au harcèlement et à la violence au travail, il n’y a pas de réponse facile. Ni le travail à distance ni le travail en présentiel, ni aucune stratégie entre les deux, n’offre une solution complète au harcèlement et à la violence au travail.

Selon des sondages récents, les femmes ont tendance à exprimer un désir plus grand que les hommes de travailler entièrement ou partiellement à distance, avec une différence d’environ 10 %.1 Les formules de travail hybrides sont liées à la dynamique du pouvoir au sein des équipes, en particulier dans les milieux de travail à prédominance masculine.2 Les femmes peuvent avoir du mal à exprimer leurs opinions en réunion et à leurs supérieurs, soit en raison d’expériences antérieures, soit par crainte de ne pas être entendues ou prises au sérieux. Les employés qui travaillent à distance, quel que soit leur genre, sont confrontés à des difficultés similaires lorsqu’ils travaillent avec des collègues en présentiel, ce qui peut entraîner un manque de sécurité psychologique. Ces facteurs peuvent se cumuler, ce qui rend plus difficile la prise de parole des femmes dans les réunions virtuelles et leur donne l’impression d’être négligées ou ignorées.3 Elles peuvent se sentir déconnectées et mal informées en raison de leur absence dans les interactions informelles, ce qui entraîne un sentiment d’isolement et un manque de soutien social dont bénéficient généralement les employés en présentiel. Cela peut nuire à une collaboration efficace et détériorer les relations entre collègues.4

Bien que certains travailleurs n’aient signalé aucune différence en termes de gravité, de fréquence, de durée, de peur de dénoncer, de tactiques de harcèlement, de représailles ou de moyens de dénonciation lorsque le milieu de travail s’est transformé avec la pandémie,5 les observations de ceux qui ont noté des changements peuvent offrir des apprentissages importants pour les milieux de travail.

En effet, un nombre important d’employés ont signalé une augmentation de la gravité, de la fréquence et de la durée des incidents lorsqu’ils travaillaient à distance, selon une étude du Centre for Research and Education on Violence Against Women and Children (CREVAWC).6 Certains employés ont trouvé que le fait d’être physiquement éloignés du bureau signifiait que les autres membres de l’organisation étaient moins conscients des interactions négatives au travail.7 Selon la situation, cela peut signifier moins de témoins potentiels pour les enquêtes, tant à l’égard d’incidents spécifiques que pour des témoignages généraux sur le comportement des employés. Cependant, une étude récente sur la technologie des chats en milieu de travail a constaté qu’elle peut aider à mettre en évidence le harcèlement au travail, que les auteurs décrivent comme opérant souvent de manière « invisible », grâce à des preuves écrites.8 Le corollaire est qu’elle peut aussi être utilisée comme preuve pour réfuter des allégations.9

Malgré la hausse des incidents notée ci-dessus, l’étude du CREVAWC a révélé que d’autres participants à l’enquête avaient ressenti une diminution de l’impact du harcèlement et de la violence pendant le pic de la pandémie. Certaines personnes interrogées ont déclaré que le fait de travailler à l’extérieur du bureau leur avait permis de se libérer d’environnements de travail hostiles.10 Bien que le retrait physique d’une personne plaignante ou mise en cause de l’environnement de travail puisse être nécessaire comme solution provisoire et puisse être facilité par l’utilisation de la technologie, les employeurs ne devraient pas considérer le travail à distance comme LA solution pour résoudre l’hostilité au travail. Les employeurs fédéraux et québécois ont l’obligation légale de fournir des environnements de travail sécuritaires à leurs employés et de prévenir la violence et le harcèlement.11 Les employeurs devraient envisager des solutions plus globales que le simple déplacement du problème. En outre, les employés ne devraient pas avoir le sentiment d’être obligés de se retirer physiquement de leur milieu de travail pour être en sécurité.

Ainsi, les dirigeants des organisations devraient prendre en compte les conséquences négatives potentielles et involontaires des différents modes de travail hybrides au fil du temps, en particulier pour les femmes. Il est essentiel d’instaurer une culture de sécurité psychologique et de confiance, tant au niveau individuel que collectif. Les gestionnaires peuvent également jouer un rôle crucial en trouvant un équilibre entre les besoins des employés à distance et ceux des employés en présentiel, en reconnaissant les inégalités en matière de ressources et de visibilité et en prenant des mesures proactives pour remédier aux déséquilibres de pouvoir qui peuvent en résulter.

Conclusion

Les organisations qui souhaitent embrasser l’équité et créer des espaces où les femmes peuvent s’épanouir doivent être attentifs aux façons dont le travail à distance et en présentiel créent des défis uniques.

En effet, les environnements de travail hybrides créent des défis nuancés pour les employeurs qui s’efforcent de respecter leurs obligations légales en matière de santé et sécurité. Bien qu’il soit important de prendre conscience de ces défis, les employeurs doivent s’assurer que les ressources offertes répondent effectivement aux besoins des employés. Cela peut nécessiter, par exemple, de tenir compte de l’impact du statut à temps partiel ou à temps plein d’un employé, ou de considérer comment les employés qui font du service à la clientèle ont des facteurs de risque différents des employés qui occupent des rôles internes.

Des actions globales telles que l’élaboration de politiques claires et complètes, l’organisation de séances de formation obligatoires, la participation à des évaluations du milieu de travail ou la consultation d’entreprises spécialisées dans les domaines du harcèlement, de la violence et de l’équité, de la diversité et de l’inclusion peuvent toutes contribuer à la création de milieux de travail sains.

Quelques éléments-clés à retenir pour les employeurs 

  • Effectuer des suivis réguliers auprès des employés (qu’ils travaillent en présentiel ou à distance) ;
  • Être attentif à l’évolution de la dynamique sociale au sein de l’entreprise, notamment lorsque les personnes font la transition entre le travail à distance et le présentiel, ou en cas de travail hybride ;
  • S’assurer que les politiques relatives à l’utilisation de la technologie et des médias sociaux sont à jour et reflètent les besoins des employés et de l’organisation.

Latitude Management est une firme multidisciplinaire œuvrant en matière d’enquête, de médiation, de formation et de consultation eu égard aux enjeux entourant notamment le harcèlement psychologique au travail. N’hésitez pas à nous contacter pour en savoir plus.

Article par

  1. Voir Martine Haas, “Women Face a Double Disadvantage in the Hybrid Workplace” (March 24, 2022), en ligne à https://hbr.org/2022/03/women-face-a-double-disadvantage-in-the-hybrid-workplace.
  2. Ibid.
  3. Ibid.
  4. Voir Mark Mortensen et Martine Haas, “Making the Hybrid Workplace Fair” (February 24, 2021), en ligne à https://hbr.org/2021/02/making-the-hybrid-workplace-fair?ab=at_art_art_1x4_s02.
  5. Voir Adriana Berlingieri et al, « Harassment and Violence in Canadian Workplaces: It’s [Not] Part of the Job » (2022) à la p 14, en ligne (pdf): London, ON: Centre for Research and Education on Violence Against Women and Children, Western University < https://documents.clcctc.ca/human-rights/Respect-at-Work-Report-2022-03-28-EN.pdf >
  6. oir Adriana Berlingieri et al à la p 14 (le rapport utilise des définitions internationales de ces termes, mais les employeurs au Canada devraient néanmoins noter cette tendance, car elle est révélatrice des expériences des travailleurs canadiens).
  7. Voir Berlingieri et al à la p 14.
  8. Voir Nelson Tenório & Pernille Bjørn, « Online Harassment in the Workplace: The Role of Technology in Labour Law Disputes » (2019) 28:3–4 The Journal of Collaborative Computing and Work Practices 293 aux pp 296, 308, 309 [Tenório & Bjørn].
  9. Voir Tenório & Bjørn à la p 309
  10. Voir Berlingieri et al à la p 14.
  11. Voir généralement Québec, Loi sur la santé et la sécurité du travail, RLRQ c S-2.1; Code canadien du travail, LRC 1985, c L-2.